De l'indépendance des journalistes
Voila maintenant plus de dix jours que la polémique fait rage autour de l’émission "A vous de juger" du jeudi 14 janvier dernier dont le thème affiché était l’identité nationale. Le coup d’éclat est venu de Vincent Peillon (PS), qui, devant participer à l’émission, s’en est retiré en informant la puissance invitante par voie d’AFP. Il a eu tort. Il aurait dû venir et exprimer ce qu’il avait à dire à l’antenne pour que les téléspectateurs l’entendent, quitte à se lever et partir. Nul doute que l’effet aurait été saisissant et plus convaincant. Il a eu grand tort également de demander la tête de la directrice générale de l’information. Tout d’abord, c’est inacceptable et, de plus, parfaitement inefficace puisqu’il lui amène ainsi des soutiens qui la confortent. Tout le petit monde politico- médiatique, ou presque, s’en est mêlé, trop content de régler des comptes et de faire semblant de s’inquiéter de l’indépendance des journalistes et du Service Public : les bonnes âmes ! Du CSA au ministre Frédéric Mitterrand il n’y eut pas de mots trop forts pour stigmatiser une attitude aussi peu politiquement correcte. Quant aux trop réelles difficultés dans lesquelles les journalistes du service Public se débattent avec un avenir doublement obéré : la nomination du futur PDG de France Télévisions par l’Elysée et la disparition voulue par la direction actuelle des seules garanties de liberté d’exercer leur profession contenues dans leur Avenant Audioviuel, les beaux parleurs s’en moquent et le SNJ attend toujours les appuis qui l’aideront à conserver une déontologie forte aux journalistes de l’entreprise. Pauvre Service Public où deux heures d’émission à une heure de grande écoute ont été consacrées en fait à l’immigration et où les deux interlocuteurs, le ministre Besson et Marine Le Pen, ne semblaient séparés que par les procédures de rejet de l’étranger. Cette émission qui était plus présentée comme un combat qu’un débat rappelait étrangement l’affaire dite "des gants de boxe" tristement célèbre. Elle avait opposé Bernard Tapie à Jean-Marie Le Pen avec les mêmes moments nauséabonds, déjà. Les téléspectateurs méritent mieux et ont beaucoup d’autres centres d’intérêt qui devraient imposer l’organisation d’émissions avec de vrais débats.
Paris, Dominique Pradalié Déléguée Syndicale SNJ France 2 le 24 janvier 2010